Berlin l’été :
ses terrasses, ses rooftops, ses djeunz qui se droguent squattent à même le trottoir, son
ciel bleu (OK, bleu-gris)… Si vous avez 20 ans (ou plus mais chut… quand on
aime on a toujours 20 alors shut the f**k up), vous avez jamais fait un été à
Berlin, vous avez raté votre vie. Et oui. Récemment, histoire de me la raconter
un peu en mode « chuis une ouf malade, je kiffe la laïfe à Berlin, wesh ma
gueule, t’as jamais fait un open air ici, nan mais allô quoi ?! » -
vous remarquez au passage que j’ai réussi à caser toutes les expressions de mon
« djeunz bingo » dans une seule phrase – j’ai décidé d’aller à au
moins UN open air à Berlin. Et OUI, ça fait deux ans que j’habite ici, mais l’an
dernier j’étais occupée. J’avais stage intensif de triangle. Bref. Je me motive
donc pour cette grande première pour moi.
Comme je ne suis
pas du tout spécialiste de la musique électronique à Berlin, je décide de faire
confiance, d’une part aux conseils de ce mec qui a l’air de s’y connaître et
que je voulais un peu impressionner quand même, ce qui a d’ailleurs bien
fonctionné puisque une semaine après c’était mon amoureux (chuis grave une
belle gosse) ; et d’autre part à un open air avec tickets achetables à l’avance,
histoire de pas me faire refouler à l’entrée après des plombes de queue (oui j’ai
développé une Berlino-videur-phobie, maladie gravement anxiogène et très
courante ici à Berlin). Me voilà donc, accompagnée de mon fidèle side-kick Soso,
encore elle, toute motivée pour un Open Air « au line-up de dingue »
(expression à apprendre par cœur et à ressortir sans modération), à savoir un
incontournable Fly Watergate Open Air à Rummelsburg, 20 euro l’entrée quand
même.
Bon, alors
Rummelsburg, je le savais pas, mais c’est LOIN. Évidemment, vu que je ne jure
que par les talons hauts et que je n’écoute jamais les bons conseils qu’on me
donne, j’étais équipée d’une ma-gni-fique paire de talons de 12 cm, ce qui était
une mauvaise idée pour deux raisons – mais n’anticipons pas. Nous voici donc
débarquées toutes pimpantes à la S-bahnof de Rummelsburg, optimistes quant à
notre capacité à rejoindre l’open air en question au bord de la Spree en
quelques minutes à pieds. Ahah. Les deux amateurs. 15 minutes, dans mes rêves.
On a bien dû marcher une bonne demi-heure, moi tanguant péniblement sur mes 12
cm, en suant sous un soleil de plomb. Car oui, bien sûr, à Berlin le ciel
n’est voilé avec un petit vent rafraîchissant QUE quand on décide d’aller à la
piscine et qu’on grelotte comme une conne à la Badeschiff, cheveux
dégoulinants, peau de poulet fraîchement plumé et tétons qui pointent sous le
maillot à l’appui. Selon la loi de l’emmerdement maximum, quand on doit se
taper des kilomètres à pattes, il fait chaud, le soleil tape vicieusement, et
il n’y a pas un souffle d’air.
Mais bon voilà,
ça m’apprendra à ne pas me renseigner sur les tram. Il s’avérera plus tard qu’il
y en a un qui s’arrête à 200 mètres de l’entrée et qui mène directement à la
gare, bien fait pour ma pomme. Nous voici donc à l’entrée, munies de nos
tickets (merci ResidentAdvisor), et on rentre là-dedans comme un couteau dans
du beurre ou une bite dans un Tenga-egg (je viens de lire un article sur MadMoizelle, disons que ça m’a marquée).
Premier constat :
les talons c’était vraiment un (très) mauvais choix. Déjà, à cause des
kilomètres de marche à pied. Et puis, surtout, parce qu’une fois arrivée je me
rends compte qu’au sol, c’est du sable. Marcher en talons dans du sable
requiert des talents de danseuse étoile qui me font clairement défaut. Je vais
donc passer les quelques prochaines heures à vainement tenter de marcher sur la
pointe des pieds, et à laisser des petits trous ronds et régulièrement espacés
derrière moi histoire que tout le monde puisse me suivre à la trace (ou se
foutre allègrement de ma gueule, c’est au choix, c’est cadeau, ne me remerciez
pas).
Deuxième constat :
on m’avait dit « Open Air », et moi j’avais compris « Garden
Party ». Je m'attendais à une grande pelouse au bord de la Spree où les
gens sont allongés nonchalamment à l'ombre des arbres et sirotent un verre de blanc
glacé en écoutant la musique en mode « chill out ». Idéalement,
j'imaginais aussi des petits fours et quelques sofas disséminés en bord du
fleuve. Je regrettais déjà de ne pas avoir d'ombrelle en dentelle pour finir de
jouer à Jane Austen. Grossière erreur. C’est Berlin ici ma cocotte. Laissez-moi
donc vous planter le décor. Sur une plage de sable artificielle (et pas du tout
au bord du fleuve d’ailleurs) est posée une estrade surélevée sur laquelle les
DJ se succèdent pour envoyer leur son. L’audience de hipsters, telle un champ
de tournesol, s’oriente en direction de la scène en se déhanchant spasmodiquement au gré
des samples. Régulièrement, ils retournent s’approvisionner en alcool et se
pressent autour d’un bar où des barmen débordés vous demandent sèchement ce que
vous voulez après un quart d’heure passé à leur agiter désespérément un billet
sous le nez. [Parenthèse : le problème à Berlin, c’est que les barmen sont
gays. Ça ne sert donc à rien de poser son décolleté sur le rebord du zinc en
espérant être servie la première. Parfois Paris me manque (mais seulement
parfois)] Ça et là, quelques convives ivres morts dorment à même le sol. Pour
la Garden Party à dentelle, coupe de champ’ et nœud-noeud, vous repasserez.
Troisième
constat, qui découle directement du second : ma robe d’été rouge tendance
fifties n’était pas exactement appropriée. J’ai cru sentir comme un signe
marqué "attention, intrus !" sur mon front. Je m'attendais limite à
entendre les sirènes se mettre en marche en mode "warning, warning ! Intruder
has been sighted ! This girl is NOT a hipster. I repeat: this girl is NOT a
hipster! Do NOT try to initiate
conversation with her!" Tous les mecs étaient en jean et T-shirt sombre
(OK, en tant que mec y'a pas tant de choix que ça, mais ils auraient pu faire
un effort sur la couleur du T-shirt), éventuellement avec une casquette (à
visière plate bien entendu, hipster oblige). Quant aux filles, c'était jean
slim ou legging. Alors bon, certes je suis une bitch, mais pardon, ces trucs là
ça ne va pas à tout le monde. J'avais envie de sortir un signe géant avec
marqué "Please dress according to the body you have, not the body you wish
you had" – mais d’une j’avais pas préparé de pancarte, de deux j’avais
déjà peur de me faire virer. Pour ces demoiselles aussi, le T-shirt sombre semble
un must have, de préférence assez lâche
(vous savez, la mode de ces débardeurs qui ont l'air d'être 4 tailles trop
grands et dont les emmanchures sont tellement larges qu'on voit le
soutien-gorge sous les bras ?). J'ai quand même noté un effort côté accessoires
: certaines filles avaient des diadèmes, des couronnes de fleurs, des chapeaux
(le plus souvent noirs) ou des maquillages marrants à paillettes.
Bon, maintenant
que j’ai bien râlé – oui bon, j’ai fait ma française, quoi – je dois l’admettre :
la musique était top. Même en y connaissant que ‘tchi en électro, là on était
sur de la house jolie, mélodique, le sound system était bien fichu avec un son
homogène tout autour du lieu, des belles basses, et, les gens n’étant
visiblement pas venus pour draguer, on pouvait gentiment danser tranquille (ceci
dit, vu comment je suis douée pour repérer les subtilissimes méthodes de drague
à l’allemande, la moitié du dance floor aurait pu être en train de me faire les
yeux doux que je ne m’en serais jamais rendu compte de toutes façons). C’était
fin, c’était happy : tu vois l’électro du Trésor ? Bah tu traces un
cercle, tu la places sur la circonférence ; ensuite tu traces un diamètre
qui relie ce point à l’opposé du cercle, et là tu peux placer la musique de cet
open air. Pour quelqu’un comme moi qui n’y connaissais rien, c’était une bonne
introduction.
Voilà, je vous
épargne le retour – tout le monde s’en fout, pas la peine de se faire des
politesses, on est entre nous. Le bilan, malgré quelques mésaventures
fringuistiques, étant largement dans le vert, je compte me laisser tenter par d’autres
open air ; par ailleurs, j’ai depuis eu l’occasion de tester quelques
autres possibilités de danser dehors par temps chaud (les live sur le rooftop
du Weekend, le ://about blank, les soirées organisées par le Wilden Renate en
plein air au Else), et on m’en a recommandé quelques autres (le Sisyphos, le
Kosmonaut) que je compte bien étrenner rapidement. L’été touchant à sa fin, je
vous enjoins à ne pas laisser traîner en longueur et à vous dégoter deux ou
trois open air sympa à vous mettre sous la dent avant la fin août.
by Camille
by Camille
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