La nouvelle est tombée quelque part au mois de janvier, au détour d’un chai thé emmitouflé vers Bergmastrasse :
« et tu savais que Lana Del Rey passait en concert à Berlin ? Einh,
tu savais pas ? Non mais allô quoi ??! » ; la belle devait effectivement
se produire le 15 avril à Tempodrum. La décision d’aller apprécier la « Gangsta
Nancy Sinatra » live fut en soit une mini bataille interne. Pour
ceux qui auraient vécu sur Mars la dernière année, petit récapitulatif.
C’est
en juin 2011 qu'une langoureuse balade répondant au nom de Video Games débarque sur la toile : au milieu d’images vintages apparaît une rousse au visage
irréel et à la voix sans âge, miaulant une chanson d’amour. Apparition, c’est
le mot. Le clip devient viral, et il aura suffit d’une vidéo pour que l’establishment
musical, toujours en manque de nouvelles idoles, porte la dénommée Lana De Rey
aux nues. Très vite adulée donc, très vite décriée également. Tout d’abord, l’américaine
se révéla être une expérience visuelle au point de décevoir les attentes portées
par son premier album : sans l’image, Born
To Die laissait une étrange impression de déception. Ensuite, plus la star devint
incontournable et plus la posture d’artiste vaporeuse flottant dans le monde des
idées se craquela ; ses premières apparitions live ratées ne firent que renforcer
l’arrière-goût rance d’une pilule toujours plus difficile à avaler. Les critiques ont peut-être été aussi féroces car proportionnelles à la déception
engendrée par la destruction du mythe : avec elle, on nous avait promis de
l’authenticité artistique, et beaucoup ont fini par n’y voir qu’un autre
produit un peu mieux ficelé que les autres, assez pour nous avoir bernés plus longtemps.
Le décalage existant entre le discours de la demoiselle, mi intellectuelle mi
porte-parole d’une Amérique white-trash fantasmatique/fantasmée, et la
réalité révélant une autre gamine propulsée par une armée de
producteurs/marketeurs ayant flairé le coup très juteux (citons ses changements
physiques, ou encore la bataille juridique qu’à été son nom même pour en
témoigner) devint problématique. On ne peut pas se réclamer de Jim Morisson et
chanter pour une marque de voiture. Une artiste intègre cultiverait le secret, non
pas le chiffre d’affaire d’H&M. Un peu d’honnêteté intellectuelle ne fait
de mal à personne... En somme, beaucoup de contradictions nous empêchant d'apprécier la belle à sa juste valeur : une chanteuse et une songwriter d’exception.
GQ |
by Denise Haas |
C’est sur une scène mi gothique mi « Bienvenue à Palm Beach » que Lana Del Rey apparaît pour ouvrir le concert sur Cola. Elle prend le temps de descendre dans les premiers rangs, d’embrasser ses fans et de ramasser les cadeaux qui lui sont frénétiquement adressés. Elle est belle (même si on n’a pas été convaincu par sa robe… Oui, fallait bien qu’on critique einh, on est française quand même), un peu irréelle comme dans ses vidéos. Fait intéressant, au contraire de la plus part de ses consœurs superstars, Lana Del Rey n’est pas une performeuse. Elle ne se met pas à se déhancher comme une professionnelle du Hustler (ou comme Rihanna, ça dépend des références). Elle n’harangue pas non plus la foule comme le ferait une Lady Gaga dans ses moments « Do it like Johnny Rotten ». Au contraire. Magnétique quand elle chante, elle apparaît timide quand la musique s’arrête. Complètement investie par ses chansons, elle les vit pleinement mais d’une façon très introvertie, sans épanchement, parvenant néanmoins à les porter vers une dimension bien différente de celle proposée sur album. Une fois la musique terminée, elle apparaît néanmoins délicieusement gauche.
Du coup, les hits s’enchainent à une folle cadence et ils y passent tous: Gods & Monsters, Ride (illustrée par son magnifique clip), Blue Velvet, Like An American, Million Dollar Man, Summertime Sadness, Born To Die, Video Game (où enfin la foule reprend les paroles), et bien entendu Blue Jeans. La chanteuse se permet même une reprise très réussie de Heart-Shaped Box et Knocking On Heaven’s Door. La réorchestration live est excellente, permettant à certaines chansons dont Burning Desire et surtout National Anthem de trouver un tout nouveau souffle. Les musiciens sont parfaits, et quant à elle, sa voix boostée par l’émotion évidente de l’interprétation live laisse pantois. Bref, nous avons passé deux heures subjuguées par une musique en état de grâce. Et c’est sur National Anthem que la belle disparaît (littéralement), après être redescendue dans la fosse et avoir remercié en « espérant revenir et continuer à jouer ma musique ».
Nous aussi Lana, nous aussi.
Ride
New track for The Great Gasby
C'est vrai, très bonne acoustique en effet, ça devait dépoter pour Motorhead! On n'a pas vu pour la bière par contre, dommage... Mais bon, la prochaine fois on ira à un concert de métal, histoire de vérifier :)
RépondreSupprimer