vendredi 6 janvier 2012

#PlaceToGo : le Berghain, "un petit club vraiment sympa, tu connais pas?"

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Souvenir d'une première fois et guide de survie à l'usage des (fausses) petites natures que nous sommes.
Prenons le risque de redonder sur le Berghain, car que dire qui n’est pas déjà été énoncé mille fois auparavant ? Meilleur club du monde (« et sûrement de l’univers » vous déclareront, sur le ton entendu de la vérité générale, vos amis berlinois), temple dédié à la musique, ode de tôle et de métal ondulant aux sonorités de brutales vibes électroniques, Eglise de la Sainte Techno, Lineups dignes du Saint des Saints… Bref, le lieu déchaîne les passions et attise les fantasmes les plus fantasques. 
Bien entendu, en disciple disciplinée de Saint Thomas, vous ne croyez que ce que vous voyez, et avez donc rechigné à courber l’échine devant ce sanctuaire tout droit sorti de l’ère soviétique. Néanmoins, vous êtes venue, vous avez vu, et avouez-le : vous avez été vaincue. Telle une brebis égarée, vous vous êtes finalement prosternée devant la flagrance d’une révélation divine : le Berghain, ça déchire sa mère.

Cependant, et à moins d’être born and raised à Berlin, d’avoir donc le clubbing comme deuxième nature, le cœur accordé aux beats crachés par les murs de Funktion 1 et une capacité d’endurance défiant les lois de la physique, pénétrer dans la Mecque de la boîte de nuit peut requérir quelques ajustements personnels. Prenons un exemple. Disons que pour votre première fois, on vous a proposé un vrai « dimanche berlinois » : aller au Berghain, un dimanche, à onze heures. Du matin. L’expérience, que vous pouvez qualifier de « quelque peu extrême » sans rougir ou craindre d’être traitée de topette (enfin… vous dîtes « extrême », le Berlinois de base dira « cool, j’avais rien prévu aujourd’hui ») mérite quelques précautions. Disons donc que vous acceptez. Voici un petit guide non exhaustif à perpétuellement compléter des bizarreries, drôleries et autres mots en –rie que vous pourriez rencontrer au Berghain. 

Petit aparté : il est, selon le point de vue, drôle (signe que vous vous habituez de mieux en mieux à la culture berlinoise) ou très alarmant (quant à l’état de votre santé mentale), qu’à aucun moment précédant le dimanche fatidique, votre cerveau ne vous ai confrontée à la véritable nature de cette entreprise. Et ce n’est que quand vous serez tirée du lit à 9h du matin que cette évidente question s’imposera enfin à votre réflexion : comment est-ce que vous lever le jour du Seigneur pour vous rendre dans ce panthéon décadent (oui, il est 9h, votre humeur est loin d'être au beau fixe), comment diable ceci a pu vous sembler être une bonne idée ?
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1) La file d’attente.

Aaah la sacrosainte file d’attente du Berghain… L’avantage de vous y rendre un dimanche midi, comme ne manquera pas de vous le rappeler votre hôte/boyfriend/whatever, c’est qu’il n’y a (habituellement) pas (trop) de queue (remarque à laquelle vous pouvez répondre par un regard soit émerveillé, soit désespéré, soit exaspéré, au choix). En temps « normal », comptez donc une bonne demi-heure/heure/heure-et-demi d’attente à trembler de froid et de peur de vous voir refuser l’accès (l'éventualité de se faire recaler après quarante minutes de trime par -5 degrés… No comment). Car le Berghain n’a pas la réputation de laisser n’importe quelles ouailles fouler son asphalte.

2) L’entrée du club.

Les clubs berlinois, au contraire de beaucoup des boites parisiennes dont la pédanterie n’est plus à prouver et appliquant des critères d’élection d’une injustice à la limite de la légalité, n’ont généralement pas pour habitude de sélectionner leur clientèle ; en somme tout le monde est bienvenu, à moins d’être vraiment trop soul, vraiment trop raide, ou vraiment trop les deux. Exception faite du Berghain. Le lieu est en effet présumé opérer une sélection drastique à  son entrée, acceptée par tous : on est le meilleur club de l’univers et de Navarre ou on ne l’est pas. Forcément, la première fois que vous avez arpenté la zone industrielle désaffectée vous conduisant à l’Olympe a été l’occasion de vous lancer dans une féroce diatribe, votre hôte/boyfriend/whatever tentant de justifier cette politique. Car si vous êtes de Paris, vous avez sûrement déjà eu l’opportunité de vous confronter à la bêtise crasse du genre humain « physio ». Alors merde, vous n’avez pas déménagé pour être soumise aux mêmes conneries, ha ça non merci einh ! Le flegme allemand prenant quasiment toujours le pas sur l’exaspération, votre hôte/boyfriend/whatever vous répondra simplement, dans un haussement d’épaules où se lira néanmoins une pointe d’énervement, que ce-n’est-pas-la-même-chose-maintenant-tu-te-tais-on-est-à-l’entrée-s’il-te-plait-bordel. Et il aura pleinement raison.

Tout d’abord, relativisons le caractère draconien de la sélection ; ce n’est pas le VIP Room, les Planches et autres trous où les fioritures du lieu en cachent mal la vacuité malodorante. En gros, vous n’allez pas vous faire recaler parce que : « désolé mec, mais ici on n’aime ni les noirs, ni les arabes, ni les jaunes, ni le reste ». Et bien que vous soyez généralement contre toute forme de sélection, vous devez néanmoins vous incliner devant la logique d’élection des Hell’s Angels du Berghain. Cette logique, vous ne pouvez rationnellement la décrire et l’expliquer – les voix des Seigneurs sont impénétrables – mais son caractère implacable ne la rend pas pour autant injuste, inéquitable ou discriminante. Preuve que ce dogme fonctionne, la légendaire atmosphère du club parle d’elle-même : everything is about love. Une technique imparable pour, tel l’Eternel, briser les Portes d’Airain (à part apprendre quelques rudiments d’allemand (parce que bon on est à Berlin, et qu’on n’aime toujours pas ces « dzalopeuries de tourisstes »), et ne pas se pointer à vingt-cinq)? Etre vous-même. Cela devrait vous plaire, particulièrement si l'éventuel temps passé en Angleterre vous a donné pour habitude d’aller clubber en pyjama, ou si vous n’êtes pas fan des trois heures de préparation nécessaires pour espérer entrer dans un endroit décent sur Paname. Enfin, être vous-même ne fonctionne que si vous êtes, bien entendu, quelqu’un de coooooool ; si vous transpirez la tête de lard, les Cerbères berlinois ont un flair internationalement encensé pour humer le connard. Et c’est avec un peu de surprise et d’amusement  que vous verrez une bande de minettes plus pimpées que des Mercedes volées se faire recaler manu militari. Ce n’est pas à coup de talons défiant les lois de la relativité, de maquillage à la truelle, de jupes inexistantes et de regards aguicheurs, ou de pantalon à pince, pull Eden Park noué sur une chemise Ralph Lauren et une coupe de cheveu estampillée « Auteuil Neuilly Passy tel est notre ghetto » que cet imposant sanctuaire vous sera ouvert, bien au contraire. Ne sur jouez pas. D’une certaine façon, le Berghain, c’est un peu comme Mac Donald : « venez comme vous êtes »*.

*cet article a été écrit à notre arrivée à Berlin. Après relecture, ce paragraphe nous apparaît un peu naïf, angéliste et perd beaucoup de son exactitude en été, possiblement à cause de l’afflux de touristes (l'éventualité du touriste rend le videur du Berghain particulièrement con, c'est quasi pavlovien). Berlin est une ville exclusive sur un modèle différent des canons parisiens, d'où l'apparence de coolitude: en gros, dans la file d'attente, au lieu d'ouïr des: "je ne suis pas rentrée, je n'avais pas sorti les Louboutins", vous entendrez plutôt des: "je n'ai pas pu rentré parce que je ne ressemblait pas assez à un clodo". Nous vous laissons juger de la légitimité de tels propos. A méditer.

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 3) Les toilettes de la mort

Un conseil : si vous venez d’entrer dans le club (en d’autre termes : si vous êtes décemment sobre), fuyez les toilettes. Pour votre Salut. Le mieux serait sans aucun doute de ne jamais y mettre l’orteil, mais les lois de la biologie/physique-quantique/astronomie sont contre vous. Tout d’abord, il apparaît difficile de passer neuf heures sans devoir éventuellement se soulager (neuf heures, absolument : si vous accompagnez des Berlinois, n’espérez même pas partir avant. Et encore, neuf heures, c’est parce que vous aurez supplié, proposé une récompense en nature, menacé de faire un scandale (par exemple, de la rejouer « le mangeur de visage de L.A. » sur le DJ du Panorama Bar dont vous n’appréciez de toute façon pas tellement la musique (oui, n'aimons pas la minimal techno. Fucking deal with it, haters). En conclusion, on racontera sûrement qu’à l’instar de votre modèle, vous avez dû trop ingurgiter de substances illicites, « et voilà le résultat, ras le bol de ces dzalopeuries de tourissstes qui ne savent pas se tenir »), et fait semblant de vous évanouir (ou vous êtes vraiment évanouie. L’extase mystique ou l’alcool, on ne sait plus trop)). Ensuite, vous trouvez au paradis des clubs vous obligera à supporter une chaleur infernale ; vous allez devoir vous hydrater. Et puis bon, le Jägermeister est à 5 euros.

Donc, et ce malgré les efforts herculéens déployés par votre périnée, vous voici aux toilettes (qui, rappelons le, sont elles ouvertes depuis déjà trois jours. On vous laisse imaginer le résultat logique). Après avoir poirotée un temps incommensurable, ça y’est, la cabine d’en face s’ouvre enfin ; pour laisser sortir une bonne dizaine de personnes. Vous ne vous posez même pas de question, vous vous ruez à l’intérieur. Et là, c’est le drame. Si vous avez vu Trainspotting, figurez-vous la scène des chiottes/de l’opium : vous aurez une description assez exacte du spectacle qui s’offre à vos yeux. D’où la nécessité absolue d’être résolument soûle quand vous devrez vous rendre aufs Klo. Car sinon, répétons-le, à vous le remake de la Divine Comédie et de la traversée des neufs cercles de l’Enfer. Vous aurez envie de vomir, mais vous vous retiendrez car la simple éventualité de devoir rapprocher votre visage du trou ou du sol vous dégoûtera à un point encore plus extrême que le fait de devoir ravaler votre petit-déjeuner. N’espérez même pas trouver du papier non utilisé. Votre corps devra être capable des pires contorsions pour espérer ressortir immaculé de cette épreuve. Contre le Mal, Dionysos demeure votre plus précieux allié : si par mésaventure vous deviez vous rendre aux toilettes, allez y plus soûle qu’un irlandais en fin de Saint Patrick. Votre vision trouble ne percevra pas l’horreur du décor, et votre bonhomie naturelle grandement alimentée par la liqueur ne s’émouvra même pas 1) d’éventuellement devoir récupérer votre portable dans le trou 2) de voir un mec s’enfoncer une bouteille dans l’anus au-dessus de l’évier où vous vous apprêtiez à boire ; ça vous fera rire, et vous vous extasierez même quelques secondes sur le spectacle (pas trop longtemps non plus car votre bon sens pourrait revenir au galop).

4) La galerie photo

Certes, on n’y entre a priori pas comme dans un musée, mais le Berghain s’avère être remarquablement beau. Après tout, vous avez minimalement neuf heures à y passer, admirez donc les contrastes créés par la lumière tamisée éclatée sur la tôle industrielle, les fleurs psychédéliques habillant les comptoirs ou les moulures étonnement haussmanniennes ornant certains des murs. Appréciez le bar non-fumeur, son allure de marbre et sa balançoire géante. Traînez autour du Panorama Bar, appréciez l'art résolument "annal" de ses tableaux, écroulez-vous dans les commodités de la conversation dissimulées dans les nombreuses alcôves. Bref, avant de partir assurez-vous d’avoir visité le club au peigne fin (à part les Darkrooms. Ou alors c’est en votre âme et conscience; vous ne pourrez-vous en prendre qu’à vous-même si ça tourne mal), et particulièrement les sorties de secours. L’escalier est en effet orné de photographies noir et blanc du très talentueux M. Marquardt, plus connu pour être le « physio » du Berghain, dont le visage tatoué et le sens de la sélection ont contribué à construire la légende du club. 

Voilà pour aujourd’hui. Les anecdotes « très-drôles-et-un-peu-glauques » viendront plus tard. Le Berghain déploie un univers unique, où beauté et trash se mêlent jusqu’à se confondre, au rythme d'une musique de qualité exceptionnelle. S’y perdre sans modération.

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13 commentaires:

  1. Article sans intérêts de "touriste français de base". Le berghain est un lieu où les gens ne jugent pas, où tout le monde est dans sa bulle pour évacuer le stress du quotidien ou tout simplement écouter les meilleurs djs du monde partager un moment unique avec le public. C'est à cause de gens comme toi/vous que la porte est dure et heureusement !

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    1. Commentaire sans intérêt d'un "snobinard de base". Cet article est amusant et n'a pas la prétention d'être un reportage de fond. Retirez le balais qui vous sert de colonne vertébrale.

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    2. En fait vous là-haut, avez vous vraiment lu l'article, qui mentionne justement "le Berghain, venez y comme vous êtes"? "Snobinard de base" (avec des déficiences en terme de capacité de lecture), je n'aurais pas dit mieux.

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  2. Tu vas au Pano sans aimer le DJ qui joue ? Tu y vas pour quoi ? Si tu veux un endroit avec du papier toilette et un sol propre, va plutôt dans un bar à cocktails d'Hackescher Markt. Ca me semble plus correspondre à tes attentes. Ou change de ville. La sélection ne doit pas être assez drastique, puisqu'elle permet à des gens comme toi d'entrer.
    Cet article est digne d'Enquête exclusive.

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  3. Enfin, faut avoir un peu d'humour et comprendre le deuxième degré voyons, pourquoi s'énerver pour si peu ?

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  4. non faut admettre que beaucoup de français(es) qui vont à Berlin se comportent comme des pisseux de français, bien cliché comme il faut. Vous voyez l'image du touriste allemand sur les plages françaises, avec le look chaussettes/tongs/coup de soleil ? Les français qui clubbent à Berlin c'est à peu près pareil.

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  5. que de haine pour un article qui se veut léger (c'est comme ca que je l'ai pris en tous cas) Relax max comme on dit chez moi!

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  6. Nan mais cest clairement du 2nd degré, moi jy reconnais un peu la candeur de la première fois où je suis allé au berghain( ça ma bien fait rire), il ny a rien de pédant... Franchememt faut vous calmer les gens!

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  7. Perso j’ai beaucoup aimé cet article, et je ne comprends pas trop les commentaires précédents puisque par exemple, l’auteur laisse justement supposer qu’il ne faut pas se prendre la tête à l’entrée du Berghain et y aller en mode décontract (en plus, si vous saviez lire, ça dit plutôt qu’elle, elle ne se fait pas recaler du club). Donc continuez à nous faire rire les filles, et ne vous occupez pas des remarques de cette espèce vraiment exécrable et bien trop rependue qu’est l’expat français bien pédant et condescendant, qui a tout vu à la vie et qui se permet d’ouvrir sa grande gueule à tout va alors que lui ne fait concrètement rien de son existence (ça m’a fait penser à un gif que vous aviez fait d’ailleurs « my only interests are drinking wine and judging people »). Pour le coup, ça serait bien que eux se cassent de Berlin.

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  8. Les toilettes ne sont pas si crades que ça, t'exagères!

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    1. To be fair, n'importe quel endroit ouvert pendant 4 jours d’affilée aurait des chiottes dégueulasses, c'est vrai :)

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  9. J'avoue ne pas saisir la levée de boucliers à laquelle nous eûmes droit à la publication de cet article. S'il semble effectivement avoir été rédigé par des djeun's venant de passer leur premier mois à Berlin (et 4 week-ends d'affilée au Berghain), il n'en demeure pas moins qu'il reste assez neutre.

    PS: "Jäggermeister" s'écrit avec un seul "g". De "Jäger", le chasseur, et "Meister", le maître. Un peu comme "Maître Chasseur". Et vous avez oublié le "e" à la fin de musée.

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    1. Ouuuups... Merci beaucoup, c'est rectifié ! (et merci bien entendu pour le commentaire, très juste. Mais apparemment tout le monde n'a pas les mêmes capacités de lecture ;))

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